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En couverture - les nouvelles routes de la Soie

07/08/2019
Source : Le Point
Catégories: Information générale

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Les ambitions expansionnistes du président Xi Jinping consacrent la domination de la Chine d'Asie jusqu'en
Afrique. Avant l'Occident ?
Il surgit d'un pas décidé, en chef
de meute de la diplomatie mondiale. A un bon mètre derrière, Vladimir
Poutine
joue des coudes avec l'eurosceptique Viktor Orban, le Premier ministre italien Giuseppe Conte, le
Pakistanais
Imran Khan ou le trublion philippin Rodrigo Duterte. Christine Lagarde, Alexis Tsipras ou encore
le secrétaire général
de l'Onu, Antonio Guterres, ferment la marche des faire-valoir de la star incontestée du
jour. Xi Jinping est un prestidigitateur. Ce 25 avril, dans un hall pharaonique
de la banlieue de Pékin, le
président chinois vient
de rassembler à ses pieds 30 % du PIB de la planète et deux tiers de sa population, à
l'occasion du 2 e forum
de sa Belt and Road Initiative (BRI) – le projet Ceinture et Route, ce que nous
appelons les nouvelles routes
de la Soie. Durant son discours-fleuve retransmis sur écran géant, le dirigeant
chinois le plus autoritaire depuis Mao promet
de nouvelles voies « transparentes », « zéro tolérance pour la
corruption » et des infrastructures « vertes ».
Quelques heures après ce triomphal raout organisé au pied
de la Grande Muraille, la garde rapprochée du
numéro un chinois renvoie au négociateur américain Bob Lighthizer un document confidentiel
de près de 150
pages couvert
de ratures : il s'agit de la version amendée d'un accord enterrant la hache de guerre entre les
deux premières économies mondiales. Pékin revient sur ses engagements, refusant d'inscrire dans le marbre
toute concession d'ouverture
de son marché à la concurrence étrangère et de réduire le rôle dirigeant de
l'Etat dans l'économie. Dans le Bureau ovale, Donald Trump fulmine et dégaine un tweet assassin : le
président protectionniste rompt abruptement les négociations pour annoncer une hausse brutale des droits

de douane américains de 10 à 25 % contre 250 milliards de dollars d'exportations chinoises, semant la
panique sur les marchés financiers.
Nouvelle guerre froide. Au coeur des chancelleries et des cercles du pouvoir à Pékin, cet enchaînement
d'événements ne trompe personne. Le succès du forum BRI – plus
de 5 000 participants enregistrés et 67
milliards
de dollars de contrats annoncés – a regonflé la confiance de l'« Oncle Xi », bousculé au début de
l'année par l'offensive tarifaire de Trump et le ralentissement de la croissance chinoise. L'initiative constitue
un bouclier pour parer les coups
de boutoir du président américain à l'orée d'une nouvelle guerre froide qui
s'annonce avec la première puissance mondiale. La participation
de dirigeants du monde entier, y compris
del'Union européenne, qui critique pourtant officiellement le projet, donne un coup de fouet à sa vision
stratégique. « Il est rassuré, car la BRI lui a permis
de tisser suffisamment de liens pour prévenir un
isolement en cas
de conflit avec les Etats-Unis », analyse un diplomate.
Depuis des siècles, l'empire du Milieu vit dans la crainte d'un encerclement, et ses mandarins s'échinent à
diviser méthodiquement les « barbares » pour prévenir tout front commun. Face au tenant
de « L'Amérique
d'abord », qui attaque tous azimuts, les stratèges chinois peuvent voir venir. Pour braver le caïd
protectionniste, l'empereur Xi contre-attaque, chevauchant le mythe
de Marco Polo, serinant la petite
musique du « doux commerce » chère à Montesquieu, mais à grand renfort
de grues et de marteaux
piqueurs. « Les nouvelles routes
de la Soie sont le projet signature de son règne », analyse Jean-Pierre
Cabestan, professeur à l'Université baptiste
de Hongkong. Ferroviaire, le grand bond en avant. Un train
porte-conteneurs
de plusieurs centaines de mètres quitte la ville de Zhengzhou (province du Henan, dans le
centre
de la Chine) à destination de l'Europe.
Périphéries émergentes. Les grues jaunes s'agitent en silence au-dessus
de la steppe kazakhe ocre et
rocailleuse. Sous un ciel bleu limpide, les immenses pinces mécaniques saisissent les conteneurs comme
des Lego pour les déplacer d'un convoi ferroviaire venu
de Shanghai à un autre partant pour Moscou. Une
opération indispensable du fait
de l'écartement différent des voies russes et chinoises. « C'est ici que l'Est et l'Ouest se rencontrent », lance le Franco-Marocain Hicham Belmaachi, ancien du géant du transport
maritime CMA-CGM et patron du port « sec »
de Khorgos, à cheval entre le Kazakhstan et la Chine, en plein
boom grâce à l'initiative
de Xi. A l'horizon, des tours ont surgi du désert et un gigantesque poste-frontière
autoroutier, nommé Horgos, peut désormais accueillir 2 500 camions par jour. L'endroit le plus éloigné des
océans, au coeur
de l'Eurasie, naguère uniquement fréquenté par des troupeaux de chèvres, se rêve en
nouveau centre du monde. Géants
de la logistique comme industriels commencent à miser sur cette nouvelle
route intérieure Asie-Europe, alternative plus rapide au trajet maritime, qui prend plus d'un mois pour relier
Shanghai à Rotterdam. Ici, en à peine quinze jours, des ordinateurs HP produits au Sichuan peuvent
rejoindre Anvers ou Hambourg dans des wagons réfrigérés. A condition toutefois que les aiguillages ou les
paperasseries aux multiples postes-frontières ne ralentissent pas la caravane. Si cette route est plus
coûteuse que la voie maritime, elle est en revanche subventionnée
de façon volontariste par Pékin comme
par Astana, qui veut surfer sur la vision
de Xi. « La construction d'infrastructures est le préalable au
développement économique », ajoute Hicham Belmaachi.
La deuxième économie mondiale compte conquérir la planète à travers ses périphéries émergentes en
étanchant leurs besoins criants d'autoroutes, d'aéroports,
de gares et de réseaux de télécommunications. «
La Chine veut s'affirmer comme un leader des pays en développement en misant sur leurs besoins
d'infrastructures », résume Mathieu Duchâtel, directeur du programme Asie à l'Institut Montaigne. D'ici à
2030, le continent asiatique à lui seul devrait investir la bagatelle
de 26 trillions de dollars en infrastructures
pour poursuivre son ascension, a calculé la Banque asiatique
de développement (BAD) en 2017. Et Pékin
lorgne également sur la colossale demande
de l'Afrique.
Les nouvelles routes
de la Soie ne sont pas qu'un discours, mais une réalité sonnante et trébuchante : selon
le Center for Foreign Relations, un groupe
de réflexion américain, la Chine y a pour l'heure investi au moins
200 milliards
de dollars. Bras de fer. Donald Trump et Xi Jinping au sommet du G20 à Osaka, au Japon, le
29 juin. Les présidents américain et chinois sont les meilleurs ennemis du monde...
Cap à
l'ouest. Xi Jinping a déjà transformé l'essai. Il est loin, le temps des ricanements, lorsqu'il lança pour la
première fois son projet titanesque à l'occasion d'un discours fondateur, en septembre 2013 à Noursoultan
(ex-Astana), capitale kazakhe au coeur
de la steppe. A l'époque, ses références nostalgiques à l'explorateur
marocain Ibn Battuta ou à Marco Polo avaient fait sourire les chancelleries. « L'Histoire est notre meilleur
guide. La gloire des anciennes routes
de la Soie montre que nulle distance géographique n'est
insurmontable, continua, lyrique, l'Oncle Xi. Si nous faisons courageusement un premier pas l'un vers l'autre,
nous pouvons emprunter un chemin conduisant à l'amitié, au développement partagé, à l'harmonie et à un
avenir meilleur. » En se lançant à l'assaut des steppes d'Asie centrale,
de la jungle d'Asie du Sud-Est ou des
déserts africains, Xi s'inscrivait délibérément dans une histoire longue qui résonne dans l'imaginaire
populaire. Dès leur plus jeune âge, les écoliers chinois lisent le classique « La pérégrination vers
l'Ouest »,
roman burlesque du XVIe siècle racontant l'expédition loufoque d'un moine et d'un sage à la recherche
de
manuscrits ancestraux entre Inde et Chine.
Le succès a été immédiat, confortant la mainmise du président chinois sur un appareil pyramidal, loin du
leadership collectif
de son prédécesseur Hu Jintao. Très vite, les officiels au garde-à-vous, effrayés par
l'implacable campagne anticorruption menée par le « prince rouge », ont repris comme un seul homme le mot
d'ordre présidentiel, devançant ses désirs. Mao l'autarcique avait ordonné à une Chine misérable
de faire un
Grand Bond en avant ; son lointain successeur trace un ambitieux cap pour l'usine du monde, à l'horizon
planétaire. Aux quatre coins
de l'empire, chaque projet financé par le secteur public ou privé – un pont, une
autoroute, une conférence universitaire ou même un incubateur
de start-up – est affublé du logo
passe-partout
de la BRI. Ce sésame devient essentiel pour arracher des fonds publics. Même les
multinationales ou chefs
de gouvernement en visite en Chine truffent leur discours de références à la BRI
pour mieux flatter la deuxième économie mondiale, lorgnant sur son énorme marché et ses investissements.
Infrastructures. Une gigantesque autoroute, aux ouvrages d'art audacieux, traverse les montagnes du Tian
Shan, dans la région autonome ouïgoure du Xinjiang. Elle relie
l'ouest de la Chine au Kazakhstan.
Accro aux liquidités. Les nouvelles routes
de la Soie sont le pendant international du « rêve chinois » de Xi,
le slogan qu'il a martelé pour conquérir le Parti en 2012. Ce fils d'un compagnon
de route de Mao, partisan
d'un nationalisme décomplexé, juge que l'heure
de la renaissance a sonné pour la Chine, rompant avec
l'extrême prudence
de Deng Xiaoping, qui appelait au contraire le pays à « attendre son heure ». En 2008, le
krach financier
de Wall Street a sonné le déclin de l'Occident et la fin d'un siècle et demi d'humiliations ouvert
par les canonnières britanniques lors
de la première guerre de l'Opium (1839-1842). Une parenthèse courte
à l'échelle des « cinq mille ans
de civilisation chinoise » dont le Parti se targue d'être l'héritier, mais cuisante.
En lançant à nouveau les mandarins, les marchands et les ingénieurs sur les routes poussiéreuses des
grands espaces, le nouveau timonier affirme le redressement d'une nation qui rêve
de retrouver sa place,
celle
de centre du monde.
Le projet, suffisamment souple, devient le nouveau catalyseur du capitalisme rouge, offrant des débouchés
aux grands groupes
de construction étatiques comme aux entrepreneurs en quête de nouvelles frontières à
l'heure
de l'essoufflement de la croissance. Les critiques dénoncent une nouvelle fuite en avant d'un modèle
insoutenable, gavé de subventions, produisant des montagnes de dettes pour le seul bénéfice des
entreprises d'Etat et la gloire du Parti. « Les réformistes honnissent la BRI, ils la voient comme une perte
d'argent au détriment du secteur privé, véritable moteur
de la croissance chinoise », juge Richard McGregor,
expert à l'Institut Lowy, à Sydney.
Pour nombre d'économistes, l'objectif caché
de la BRI est d'exporter – à défaut de les résorber – les «
surcapacités » d'un secteur
de la construction essoufflé, tout en avançant les pions politiques de Pékin. Les
constructions
de voies ferroviaires du Laos à l'Afrique, en passant par la Thaïlande et l'Indonésie, financées
par les banques publiques, permettent d'offrir
de nouveaux contrats aux entreprises d'Etat et du travail à des
Chinois employés jusque dans la savane africaine. « Xi est taillé dans le moule soviétique, il a une vision
étatiste
de l'économie », pointe le sinologue David Shambaugh, professeur à l'Université Georgetown, à
Washington. Les nouvelles routes
de la Soie prolongent un modèle accro aux liquidités, fondé sur les
subventions et la centralisation, loin
de la qualité exigée pour la montée en gamme de la deuxième économie
mondiale, jugent les sceptiques. Ingénierie chinoise. Le 21 mars, inauguration du tunnel
de Boten (nord du
Laos, à la frontière chinoise), le long
de la future ligne ferroviaire qui reliera Kunming (Chine) à Vientiane
(Laos).
Effet boomerang. Plus grave, la BRI menace d'emballer une nouvelle fois la dette du tiers monde, met en
garde le Center for Strategic and International Studies. Car l'essentiel des fonds est constitué
de prêts, loin
d'être gratuits. « Ils sont sur un rythme d'au moins 10 milliards
de dollars de prêts par an, ce qui est très
substantiel », a calculé le chercheur Mathieu Duchâtel. Si Pékin ferme les yeux sur les entorses aux droits
de
l'homme ou à la démocratie, contrairement aux bailleurs occidentaux, il impose des taux d'intérêt
commerciaux qui placent certains pays plus fragiles en situation
de dépendance. Huit d'entre eux, tels le
Laos, le Kirghizistan ou le gigantesque Pakistan, devront 40 %
de leurs créances à la Chine. Ainsi, le Sri
Lanka a courbé l'échine et préféré céder pour quatre-vingt-dix-neuf ans son port
de Hambantota, offrant aux
navires chinois une escale stratégique au coeur
de l'océan Indien en échange d'un allègement de sa dette.
Echaudé, l'avisé Premier ministre malaisien Mahathir bin Mohamad, champion du Mouvement des
non-alignés, a contraint Pékin à renégocier d'un tiers à la baisse le coût d'une future voie
de chemin de fer
dans la péninsule, accord conclu par son prédécesseur.
Les problèmes financiers du Pakistan sont autrement plus graves et révèlent les limites
de l'offensive des
nouvelles routes
de la Soie. Principal bénéficiaire des largesses chinoises avec 62 milliards
d'investissements, soit 20 %
de son PIB, Islamabad est aujourd'hui au bord de la faillite et doit quémander
l'aide des bailleurs internationaux. Le couloir sino-pakistanais qui vise à relier l'empire du Milieu au port
de
Gwadar, sur l'océan Indien, n'a pas offert au pays d'Imran Khan le coup de fouet économique escompté. Et
menace désormais Pékin d'un effet boomerang. « Si le Pakistan entre en défaut
de paiement, Xi risque d'être
pointé du doigt », juge Richard McGregor, qui fut correspondant du Financial Times à Pékin.
Encerclement. Ces turbulences sont un avertissement qui annonce un recalibrage du projet, rattrapé lui aussi
par les difficultés intérieures
de la Chine, dont la croissance est au plus bas depuis vingt-sept ans. « Du fait
du vieillissement
de sa population et du ralentissement de son économie, la Chine n'aura bientôt plus le
bazooka financier du passé », avertit Richard McGregor, qui prédit : « Les ambitions
de la BRI vont être
revues à la baisse et recentrées sur des projets plus modestes. »
Une réalité déjà perceptible en avril lors du forum BRI, au cours duquel Pékin a ajusté son discours face aux
critiques. « La BRI n'est pas un club privé », a juré Xi, répliquant à Washington et à Bruxelles. Pour
amadouer des gouvernements sceptiques, la deuxième économie mondiale donne des gages
de
transparence sur les appels d'offres et la durabilité environnementale des projets. « Ils mettent en scène
l'écoute, mais les changements risquent d'être cosmétiques », juge pourtant Mathieu Duchâtel.
Crise
de croissance ou âge de raison ? Lancé en 2013 dans les steppes, le projet de Xi s'installe aujourd'hui
dans le paysage eurasiatique, traçant sa route à travers montagnes, vallées et réseaux
de
télécommunications et encerclant l'hémisphère occidental américain. Un pari sur l'Histoire à la destinée
encore incertaine. « L'important est
de regarder où en seront les nouvelles routes de la Soie dans cinq ans »,
estime Richard McGregor. Une bagatelle à l'échelle
de l'histoire de la Chine, mais un horizon proche pour
l'empereur Xi, qui peut envisager un règne à vie. « C'est le début
de quelque chose, personne ne peut
encore dire où cela nous mènera », assure Hicham Belmaachi en regardant les grues s'agiter au-dessus des
dunes
de Horgos§
 


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